Les productions culturelles – qu’il s’agisse de musique, de littérature ou de peinture – constituent un miroir de la société. Elles projettent des images et des réalités que l’on ne perçoit pas toujours, révélant ainsi la substance profonde d’un peuple. À travers les paroles, les idées, le langage et les représentations visuelles véhiculées par ces œuvres, on peut mesurer la « santé » ou les maux qui minent une nation.

La trivialité culturelle et la déviance sociale

Selon Émile Durkheim (1897), lorsque l’on constate un affaiblissement ou un manque de normes claires – phénomène qu’il appelle « anomie » –, la société entre dans un état de désordre moral. Ainsi, lorsque ce que l’on qualifie de « trivialité culturelle » (paroles, musiques ou comportements qui s’éloignent des valeurs établies) parvient à infiltrer des espaces jadis considérés comme sacrés ou « officiels » (par exemple l’Église ou l’école), cela traduit un niveau avancé de crise sociale.

Exemple : Il y a dix ans, il aurait semblé impensable d’entrer dans un lieu de culte ou d’éducation pour y chanter des paroles jugées offensantes. Aujourd’hui, le fait que cela devienne tolérable, voire acceptable, montre que la déviance est en passe de devenir la norme. Cette évolution signale une dégradation profonde de la cohésion sociale.

Impact sur la jeunesse : l’apprentissage social

D’après la théorie de l’apprentissage social d’Albert Bandura (1977), les jeunes apprennent en imitant les modèles qu’ils observent. Si les « modèles » en question (artistes, influenceurs, etc.) promeuvent des comportements ou un langage déviants, les nouvelles générations finiront par intégrer ces repères comme étant la norme. C’est pourquoi, lorsque la musique et les paroles véhiculent des messages contraires aux valeurs morales, les jeunes y voient un référentiel de comportement « normal ».

Conséquences pour l’avenir

1. Dégradation des valeurs :

Les œuvres culturelles, censées éclairer la conscience collective, deviennent un vecteur de banalisation de la violence, de la vulgarité ou du non-respect des valeurs fondamentales.

2. Perte de repères :

En psychologie sociale, l’effondrement des normes collectives peut engendrer une multiplication de comportements hasardeux, conduisant à des conflits ou à une insécurité grandissante.

3. Affaiblissement des institutions :

L’Église, l’école et d’autres espaces traditionnellement sacrés ou officiels, en étant envahis par des expressions jugées déplacées, perdent leur rôle protecteur et stabilisateur. La société plonge alors dans une crise identitaire.

Conclusion

On constate que musique, littérature et peinture – qui devraient contribuer à la prise de conscience d’un peuple – reflètent une société en crise lorsqu’elles en arrivent à renverser les valeurs établies. Si ces manifestations culturelles « triviales » deviennent la norme, on peut parler d’une forme de métastase sociale. Cependant, en prenant conscience de ce phénomène et en rétablissant des repères solides, il reste possible de redresser cette anomie et de réorienter la jeunesse vers des modèles plus constructifs.

« Culturellement, il nous incombe de sélectionner ce que nous offrons à la jeunesse, afin d’éviter une déviation menant à l’effondrement total des normes sociales. »

(Durkheim, 1897 ; Bandura, 1977)

Samuel Jean Baptiste