
Haïti est en deuil. Frankétienne, l’un des plus grands écrivains, artistes et penseurs haïtiens, est décédé ce jeudi 20 février 2025 à l’âge de 88 ans. La triste nouvelle a été confirmée par son épouse, qui a indiqué qu’il s’est éteint paisiblement dans sa résidence à Delmas 31. Avec lui disparaît une figure emblématique de la littérature et des arts en Haïti.
Un parcours exceptionnel
Né le 12 avril 1936 à Ravine-Sèche, une localité de l’Artibonite, Jean-Pierre Basilic Dantor Franck Étienne d’Argent, connu sous le nom de Frankétienne, a marqué la culture haïtienne par son talent multidisciplinaire. Écrivain, poète, dramaturge, peintre et musicien, il a été un fervent défenseur de la créativité et de l’identité haïtienne.
Il est l’un des fondateurs du mouvement “Spiraliste”, un courant littéraire qui revendique une écriture dynamique et rythmée, à l’image du chaos et de la richesse culturelle haïtienne. Ses œuvres, à la fois complexes et engagées, reflètent les réalités sociopolitiques du pays et luttent contre l’oppression sous toutes ses formes.
Une œuvre monumentale
Frankétienne a écrit plus d’une cinquantaine d’ouvrages, parmi lesquels on peut citer “Dezafi” (1975), le premier roman rédigé entièrement en créole haïtien, qui explore les thèmes de la révolte et de la liberté. Il a ensuite publié une version française, “Les Affranchis de l’Ordre Noir”. D’autres œuvres marquantes incluent “H’éros-Chimères”, “Ultravocal” et “Mûr à Crever”, qui sont devenues des classiques de la littérature haïtienne et mondiale.
Son engagement ne se limitait pas à l’écriture : Frankétienne était également un peintre prolifique, dont les œuvres colorées et tourmentées exprimaient une vision unique de la condition humaine. Il a aussi laissé son empreinte dans le monde du théâtre avec des pièces comme “Pélin-Tchocho” et “Foukifoura”, qui ont captivé plusieurs générations.
Un intellectuel engagé
Frankétienne était un homme de combat, un intellectuel qui n’a jamais cessé de défendre son pays à travers son art. Il s’est toujours exprimé contre l’injustice, la dictature et la misère qui rongent Haïti. Ses prises de position courageuses lui ont valu admiration et reconnaissance, tant en Haïti qu’à l’international.
En 2021, il a reçu le Grand Prix de la Francophonie décerné par l’Académie française, une distinction qui venait couronner une carrière exceptionnelle au service de la langue et de la culture.
Un vide immense
Avec la disparition de Frankétienne, Haïti perd une véritable icône, un génie créatif qui a su transcender les frontières par son talent et son engagement. Son héritage, immense, continuera d’inspirer les générations futures.
Ses admirateurs, ses proches et toute une nation saluent aujourd’hui la mémoire d’un homme qui a dédié sa vie à la beauté, à la révolte et à l’amour de son peuple. Repose en paix, Maître.